L’Étinbulle

Bocage : n.m. Paysage de parcelles (champs ou prairies), de formes irrégulières et de dimensions inégales, limitées et closes par des haies vives bordant des chemins creux.

❓ Le Saviez-vous ?

Une haie par son épaisseur et sa capacité thermorégulatrice permet la réduction de 30 à 50 % de la vitesse du vent et l’augmentation de 1 à 2° C des basses températures sur la parcelle protégée. Le feuillage en tombant apporte au sol une biomasse riche et fertilisatrice.

Aujourd’hui les haies bocagères, associés aux chemins creux, ont une véritable fonction de « corridor écologique » dans des espaces agricoles de plus en plus ouverts. Non seulement de nombreux animaux, oiseaux et insectes y vivent, mais ils permettent aussi des traversées d’un habitat à l’autre pour la petite faune sauvage.

Double haie formant un chemin creux, du coté de La Meauffe.
Romain Bréget, wikimédia, CC By-SA 4.0

🌻 Protectrice et pleine de ressource

Les haies constituées d’arbustes épineux permettent de maintenir le bétail sur les parcelles ou de l’empêcher d’entrer dans un champ. Elles limitent aussi le passage d’animaux sauvages qui pourraient détruire les cultures (sangliers, cervidés par exemple).

Grâce au système racinaire étendu des arbres, la haie aide à retenir la terre et l’eau sur les pentes et à assainir les parcelles humides. Elle protège les terrains des vents desséchants de l’été. En agriculture elles permettent de protéger le bétail des vents froids et humides de l’automne. L’arbre de haie peut aussi produire un fourrage d’appoint au bétail (jeunes tiges de frênes par exemple). Les haies élaguées régulièrement, entre 7 et 9 ans selon les anciens baux ruraux, fournissent du bois de chauffage et des fruits (châtaignes, noix). Selon les régions, des fruitiers (pommiers, poiriers) y sont aussi plantés, créant de véritables bandes de cultures le long des parcelles.

⏳ Le bocage est une construction ancienne et progressive.

Les haies bocagères avaient à l’origine pour fonction de mettre en réserve les parcelles qu’elles entouraient. Le terme bocage désignait un petit bois.

Le bocage résulte des grands défrichements initiés à partir du 11e siècle. La forêt est alors morcelée en bandes encadrant les zones de cultures. Les terres seigneuriales à partir du Moyen-âge ont étés les premières encloses, par la création de talus et la plantation volontaire d’arbres, pour créer des réserves de chasse (garenne) dont l’accès était réservé au seigneur. Des parcelles de forêt étaient mises en défens afin de permettre la régénération après une coupe en protégeant les jeunes tiges de l’appétit du bétail et des animaux sauvages.

Pages d’enluminure tirée des Très riches heures du Berry, entre 1412 et 1416. La parcelle cultivée est protégée par des haies.

Progressivement, avec le recul de la forêt, tant pour augmenter la surface cultivable que pour répondre aux besoins en bois (construction, bois de chauffage, arts du feu et dans une moindre mesure artisanat), l’usage de la haie se développe. Si la terre appartient aux seigneurs ou au clergé, le paysan qui l’exploite (en fermage par exemple) doit entretenir la haie, qui lui fournit régulièrement du bois de chauffage.

Dans l’Ouest de la France, la mise en place systématique des haies bordant les parcelles correspond à la période Révolutionnaire puis à la Restauration. La notion de propriété terrienne s’accentue alors fortement, entraînant une redistribution des terres à de nombreux petits propriétaires qui matérialisent ainsi la limite de leurs parcelles.

Au 19e siècle, la transmission par héritage de la terre, redivise encore l’espace à chaque génération et le maillage du bocage se ressert. Le bocage connaît son apogée dans la seconde moitié du 19e siècle.

📣 Un patrimoine en net recul

Après la 2e Guerre Mondiale, le bocage dont l’entretient est conséquent (entretient de la haie, du talus), est perçu comme une contrainte. Avec la mécanisation, et l’intensification de la culture, il apparaît comme inadapté aux nouvelles pratiques culturales. Il recule fortement dans les espaces agricoles. Lors du remembrement (regroupement de parcelles dans les années 1970-80), de nombreuses haies bocagères sont supprimées, les talus sont arasés et la haie perd son statu juridique propre.

Ce changement d’écosystème, entraîne la disparition de l’habitat de nombreux animaux et insectes, soumet les terres à une plus forte érosion et à une plus grande exposition au vent.

Vue aérienne comparée, à gauche 1949 et à droite 2016 autour de Pré-en-Pail (Mayenne). Source IGN.

🎬 Passons à l’action

Aujourd’hui considérées comme des puits de carbone, espace de biodiversité et de production (bois, fruits) les haies commencent à être revalorisées. Il existe de nombreuses fonctions à la haie, et de nombreux types de haie : fruitières, bocagères, vive ou brise-vent.

Si vous avez la chance d’avoir une haie bocagère, entretenez-la. Elle vous fournira du bois et accueillera pour votre plaisir oiseau et écureuil. Vous pouvez regarnir une haie vieille haie dont il ne reste plus que les espèces de haut jet, avec des espèces ornementales ou des petits fruits.

Si vous avez un petit bout de terrain, vous pouvez aménager une haie fruitière composée d’arbre de moyen jet, qui a le triple avantage de vous procurer des fruits, d’attirer les pollinisateurs et de créer des espaces différenciés : les interfaces sont toujours des espaces riches !

Au jardin, des haies basses de buissonnants servent d’abris aux auxiliaires et créer de micro-reliefs qui abritent vos cultures. Vous pouvez aussi aménager de petites haies sèches (ou haies Benjes) qui vous permettront de valoriser les branchages issus de l’élagage (plutôt que de les emmener à la déchetterie) tout en constituant de jolies bordures et abri à hérisson.